Catherine, Pauline et Camille

A Tchita, capitale du kraîs de Transbaïkalie, il avait une rue des Dames, la Damskaya, où l’on n’allait pas retrouver des petites dames pour quelques instants coquins, mais qui honorait des femmes de bagnards. Aujourd’hui ce qui reste de cette rue,  comme la rue Dekabristov, conduit au musée dédié à elles et leurs maris, les Décembristes (ou Décabristes).

La Sibérie  « la Maison des Morts » a toujours été une terre de déportation. C’est donc en Sibérie, près d’Irkoutsk et de  Tchita que sont déportés 121 officiers rebelles après le coup d’état raté du 16  décembre 1825 qu’ils ont fomenté contre le tsar Nicolas I.  Aristocrates, instruits, ils sont inspirés par les idées des philosophes des lumières  et,  groupés en sociétés secrètes, dont la franc- maçonnerie, militent pour  l’abolition du servage et  pour une monarchie constitutionnelle.

Leurs épouses sont  autorisées par le tsar à demander le divorce. Mais neuf de  ces  femmes  et  deux fiancées suivent  leurs maris et amoureux  en Sibérie. Comme sanction à cette décision elle doivent signer un acte de renoncement à  tous leurs biens, sont  déchues de leurs droits civils, perdent le droit de garde de leurs enfants confiés à leurs famille et leurs enfants à naître en Sibérie seront serfs d’état.

Parmi elles, Catherine, Pauline et Camille, trois françaises.

Catherine Laval, est une jeune fille de la haute société de Saint Petersbourg, de mère russe et de père français expatrié qui entretiennent un salon littéraire et musical  très couru. Elle épouse le prince  Serge Troubeskoy, colonel d’armée à 26 ans  qui a fait la campagne contre Napoléon. Nommé chef de la rébellion il est envoyé au bagne en Sibérie.  Catherine  renonce à sa vie privilégiée et avec plusieurs autres épouses entreprend  alors un voyage périlleux à travers la Sibérie. Elle meurt à Irkoutsk deux ans avant l’amnistie de 1856. Serge rentre en Russie européenne avec ses quatre enfants.

Pauline Gëbl,  jeune fille noble ruinée par ses tuteurs se lance seule à travers l’Europe pour  travailler comme modiste à Moscou où elle rencontre Yvan Annenkov, héritier d’une grande fortune. Leur  différence de situation sociale rend le mariage impossible malgré la naissance d’une fille. Après la rébellion Yvan  est arrêté.  Elle confie sa fille à la mère d’Yvan. Les amants se marient au bagne et restent 30 ans en Sibérie.

Camille le Dantue,  fille de la gouvernante française de  la noble  famille Ivachev, est amoureuse du  fils Vassili Ivachev  mais la différence de statut social la dissuade d’avouer son amour. Après l’arrestation et le procès,  Vassili  perd ses titres de noblesse et tous ses biens . C’est alors qu’elle lui avoue ses sentiments qui sont partagés et part en Sibérie rejoindre son futur mari. Ils meurent là- bas très jeunes tous les deux.

En Sibérie les femmes des Décembristes  louent des isbas près des centres de détention, font tout pour soulager les tourments des proscrits en leur faisant parvenir de la nourriture,  des vêtements chauds, écrivent à leurs famille. La vie de ces femmes   est très dure mais elles restent unies pour survivre.

A la fin des travaux forcés  les Décembristes  ne sont pas autorisés à revenir en Russie européenne mais subissent l’exil jusqu’en 1856 à l’avènement du nouveau Tsar Alexandre II qui signe  l’acte d’amnistie.

Si le coup d’état des Décembristes a échoué ceux- ci et leurs femmes ont eu une grande influence en Sibérie qui a vu arriver des gens éduqués, lettrés, démocrates qui  ont mis en oeuvre leurs idées en s’entre-aidant et apportant du secours aux populations locales démunies. Ils ouvrirent des écoles pour les garçons et les filles, des  dispensaires. Une vie urbaine et culturelle  est née avec eux dans ce pays perdu.  A ce jour ils sont toujours honorés pour avoir été les premiers révolutionnaires russes.

A  Tcherychevsk dans le kraïs de Transbaïkalie il pleut comme vache qui pisse. Quand on est bloqué dans une chambre d’hôtel exiguë à soupente quelle attitude adopter?

Le pofigisme qui permet d’éviter de se suicider (cf JiIhel)  ou le think positive?

Ginette

 

L1020090

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Insurrection_d%C3%A9cabriste

https://fr.rbth.com/art/histoire/2016/03/03/ces-francaises-qui-choisirent-la-siberie_572815

 

 

8 réflexions sur “Catherine, Pauline et Camille

  1. Illustré par un magnifique téléfilm de Yanick Andrei de 1979 « la lumière des justes » avec Chantal Nobel. La chanson « être » par Charles Aznavour.
    Bise

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  2. Merci pour cette leçon d’histoire que j’ignorais aussi. Grâce à vous, je m’instruis en histoire et géographie…. » ( la Bouriatie).  » Mieux vaut tard, que jamais « !
    Malgré la pluie sibérienne, je vois que vous gardez le moral.
    A Paris, nous avons un temps splendide…..
    Think positive !
    Bisssss,
    Marie

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  3. Merci pour ce passage très émouvant de l’histoire sibérienne remarquablement bien traduit par Ginette!
    Ginette, tu devrais te mettre à l’écriture!
    Je suis avec assiduité tous vos déplacements et quel périple!

    Je vous embrasse

    Françoise…. de Roanne…

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  4. Je ne sais pas si ces révolutionnaires de maris en auraient autant fait pour leurs femmes….30 ans en Sibérie…Hum!?
    Chapitre très intéressant de l’histoire Russe, merci!

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