Eric Dumas, dit « le Riri », grand voyageur devant l’éternel*, avoua un jour à Bébert éviter soigneusement, lors de ses pérégrinations, les endroits touristiques.
« A quoi bon voyager, alors ? » se dit Bébert à part soi. Un court séjour à Marrakech, passage obligé de tout circuit au Maroc, allait lui démontrer la -relative- justesse de cette assertion.
« A Marrakech il vous faut absolument voir le jardin de la villa Majorelle, le musée Yves Saint Laurent, les tombeaux saadiens et, bien sûr, la place Jemaâ el-Fna » avait-on dit à Ginette.
Elle et Bébert étaient donc arrivés dans la Ville rouge,
avaient garé le sidecar pour trois jours dans un centre de contrôle technique pour automobiles (!) et, dès le lendemain de leur installation dans un riad de la médina,
avaient pris un taxi pour le jardin de la villa Majorelle.
Ils n’étaient pas les seuls à avoir eu cette idée
idem pour le musée Yves Saint Laurent voisin.
Ils avaient donc momentanément renoncé à visiter ces hauts lieux de la culture branchée, se promettant d’y revenir le lendemain à l’aube, et s’étaient rabattus sur les tombeaux saadiens.
Hélas :
Abandonnant les sépulcres surfréquentés ils avaient alors décidé de flâner sur la grande place de la médina, la place Jemaâ el-Fna**, espérant que sa vastitude diluerait sa fréquentation;
Peine perdue :
Le Riri avait raison !
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Le lendemain, sautant le petit-déjeuner, Ginette et Bébert furent les premiers à pénétrer dans le jardin de la villa Majorelle.
Ils ne regrettèrent pas leur jeûne
même si la visite du musée voisin
encore désert à cette heure, enthousiasma Ginette mais non Bébert pour qui l’art contemporain de Christo et Jeanne-Claude***, les emballeurs de monuments, auxquels une exposition temporaire était consacrée, est du « foutage de gueule »
(La robe de la mariée)
comme est du « foutage de gueule » la prose intello-artisto-journalistique à propos de l’oeuvre, bien artistique, elle, du successeur de Christian Dior :
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Ils en tirèrent les conclusions
1°) que s’il ne faut pas systématiquement éviter les lieux touristiques, du moins faut il s’y rendre tôt le matin ou, mieux, hors saison ou, encore mieux (comme ils l’avaient fait pour l’Egypte), en période d’attentats,
2°) que rien n’est plus envoûtant que les endroits inconnus, autrement dit les « culs du Monde »****, tel ce village anonyme traversé sous l’oeil de la cigogne
ou la ferme, aujourd’hui maison d’hôtes (très rustique !), dans laquelle Michel Jobert a passé son enfance
ou encore la petite ville de Larache, en arabe el Araïch, autrefois forteresse de pirates
puis colonie espagnole et aujourd’hui oubliée des tours opérateurs alors que c’est une vraie merveille, avec sa place andalouse
sa médina ou Jean Genet avait ses (mauvaises) habitudes
et son front de mer si romantique…
Ginette et Bébert y firent un délicieux repas de crevettes
dans un grand café de style espagnol tenu par un amateur d’Omar…
…Sharif.
B.
*Pour ceux qui ne connaissent pas (encore) Eric Dumas, dit « le Riri » : https://youtu.be/kS-SU4mIG3c?t=2
**Dont le nom signifie « Assemblée des morts » car c’est là que l’on exécutait les criminels et exposait leurs têtes coupées… pour l’exemple.
*** https://fr.wikipedia.org/wiki/Christo_et_Jeanne-Claude
**** Comme exemple de grand amateur de culs du Monde : http://lesblogs.motomag.com/tongue-rider7/
J’ai séjourné et aimé Marrakech à une période où le tourisme de masse ne « sévissait » pas encore !
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Plutôt d’accord avec Riri. Je préfère les endroits où l’on voit la vraie vie des gens que ceux où la foule se presse. Pas vraiment agoraphobe, mais il est vraiment jouissif de prendre du recul sur un « point de vue » sans avoir une marée humaine devant les yeux qui te cache l’objet de ton regard. Les petits villages, le travail d’un artisan qui t’invite à le voir bosser, tu peux lui acheter sans crainte de te faire refiler une « chinoiserie » même si c’est trop cher, tu sais que lui en profitera.
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